samedi 10 décembre 2016

journee internacional des droits de l'homme

Pour certains spécialistes, la notion encore très floue de droits de la personne serait apparue dès le début du XIIIsiècle. Pour d'autres, la conception des droits de l'homme en tant de tels serait contemporaine du Bill of right de 1689, qui parachève la révolution anglaise de 1688 en mettant fin à l'absolutisme royal. il s'agit du premier véritable contrat liant le monarque et le peuple, lui même déclaré "souverain". Ce "contrat" met un terme au concept de royauté et de pouvoir de droit divin. La déclaration rappelle les violations commises par Jacques II et énumère les droits reconnus au peuple depuis 1215 (par exemple : "l'autorité royale n'a pas force de loi, la loi est au-dessus du roi.LES ÉTATS-UNIS PATRIE DES DROITS DE L'HOMME
Mais la quasi-totalité des historiens s'accorde sur le fait que la notion actuelle est née au XVIIIsiècle. "La Déclaration d'indépendance américaine, qui elle-même reprend une partie du Bill of rights de l'Etat de Virginie promulgué en 1776, est la première Déclaration des droits de l'homme. Ils constituent les textes symboliques de la naissance des droits de l'homme au plan politique et juridique", assure Patrice Rolland, professeur agrégé de droit public chargé du cours d'histoire des idées politiques à l'université Paris-XII. "D'ailleurs, la Déclaration française des droits de l'homme de 1789 n'est que le prolongement de l'esprit de ces textes, même si elle a eu un plus grand retentissement dans l'histoire."
Au XIXsiècle, les excès de la révolution industrielle accouchent des premiers textes relatifs aux droits des travailleurs. "Ce siècle a été décisif quant à l'avènement des droits de créances (droits qui impliquent une action effective de l'Etat et, dans la majeure partie des cas, un engagement important de fonds publics)", ajoute l'universitaire. Puis, la première moitié du XXsiècle, ponctuée par deux guerres mondiales et marquée par la Shoah, sera à l'origine de l'internationalisation des droits humains. Les deux guerres ont prouvé aux grands de ce monde que la conception selon laquelle seuls les Etats décident du traitement de leurs citoyens ne pouvait perdurer.
L'INTERNATIONALISATION DES DROITS HUMAINS
La Déclaration universelle des droits de l'homme est adoptée au lendemain de la seconde guerre mondiale, le 10 décembre 1948, par les Nations unies. C'est le point de départ d'un long et fastidieux processus d'internationalisation de la notion de droits humains. Pour Douglas Griffin, avocat américain, "cette internationalisation est l'un des principaux héritages légués par le XXsiècle. Elle consacre la reconnaissance de l'individu en tant que tel et instaure la nécessité d'une défense internationale par la coopération entre les Etats".
La Déclaration universelle de 1948 a été suivie de plus de 70 traités internationaux, dont l'important pacte international de 1966 relatif aux droits civils et politiques et celui relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Au niveau du Vieux Continent, la plupart de ces textes ont été repris et intégrés à la Convention européenne des droits de l'homme adoptée en 1950. Les nombreux traités internationaux ont progressivement élargi la sphère des droits humains. En ce début de siècle, il convient de distinguer trois grands types de droits : les droits civils et politiques, qui protègent l'individu en tant que tel (le droit à la vie, à la liberté religieuse, etc.) ; les droits économiques, sociaux et culturels, qui visent à garantir l'accès à un certain nombre de prestations (droit au travail, droit à la sécurité sociale, etc.) ; les droits dits "de troisième génération", qui sont destinés à servir la communauté internationale dans sa globalité (la protection de l'environnement, du patrimoine mondial, par exemple). Si, sur le papier, les droits fondamentaux semblent protégés de manière satisfaisante dans un grand nombre d'Etats, le problème crucial demeure la mise en œuvre de la protection des droits humains au niveau international. Selon Patrice Rolland, "l'acceptation des droits de l'homme en droit international est restée largement fictive".
L'EXEMPLE DE L'EUROPE
L'internationalisation absolue des droits de l'homme, assortie d'outils juridictionnels à même de faire respecter les textes, progresse donc à petits pas. Pour Henri Leclerc, président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme : "L'Europe est un exemple intéressant et encourageant de protection supranationale des droits de l'homme. L'Europe a su créer la première juridiction supra-étatique au monde, en se dotant de la Cour européenne des droits de l'homme basée à Strasbourg. Elle a étendu et renforcé la notion d'Etat de droit. Les Etats ont accepté de réduire leurs compétences au profit d'une juridiction supérieure dont les juges transcenderont forcément les clivages nationaux, nationalistes. A un autre niveau, l'existence même de l'Union européenne apporte de l'eau au moulin des promoteurs du respect des droits humains. Regardez les efforts produits par la Turquie pour se mettre en conformité avec les standards européens en la matière, car, au bout, il y a la carotte de l'adhésion à l'Union…"
Reste que la mise en place d'une justice internationale à même de faire respecter les traités semble plus délicate. Pour Antoine Garapon, magistrat et secrétaire général de l'Institut des hautes études sur la justice"les bilan du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) et du Tribunal pénal pour le Rwanda(TPIR), sont assez mitigés. Si le travail du TPIY est dans l'ensemble remarquable, le fonctionnement du TPIR est, lui, un échec".
UNIVERSALITÉ VERSUS SOUVERAINETÉ NATIONALE
Cette aspiration à une justice internationale efficace a donné naissance à la Cour pénale internationale (CPI), officiellement en fonction depuis le 1er juillet 2002. En février 2003, on comptait déjà 89 Etats signataires. Si l'avènement de la CPI représente une avancée majeure en termes de lutte contre l'impunité et de progression de l'équité, sa seule existence ne changera pas la donne en quelques mois. Antoine Garapon insiste sur le fait que "la difficulté de la Cour pénale internationale est désormais d'être capable d'inventer un produit de synthèse qui n'existe pas encore, un fonctionnement fondé sur la justice internationale mais aussi sur des considérations de politique internationale". Ces considérations politiques entravent la croissance de la CPI. Les Etats-Unis s'opposent à son existence, car ils craignent de voir un jour leurs militaires traduits devant cette juridiction. Patrice Rolland rappelle ainsi que "la souveraineté de l'Etat a toujours constitué le principal obstacle à la protection et à la promotion des libertés".
Pour accélérer le processus de protection, de promotion et d'internationalisation des droits humains, il faudrait que les pays acceptent de sacrifier un peu de leur souveraineté. Mais, comme le rappelle Federico Andreu, conseiller de la Commission internationale des juristes, "la raison d'Etat et le droit humanitaire sont très souvent en contradiction". La récente abrogation, le 12 juillet 2003, de la loi belge sur la compétence universelle démontre que les pressions demeurent fortes en la matière.
L'universalité, qui serait gage de protection maximale des droits de l'homme, n'est pas encore d'actualité. Pour Philippe Kirsch, président de la Cour pénale internationale, "il faudra attendre quelques décennies pour arriver à cette universalité, mais je pense que ce n'est qu'une questions de temps".




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